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Rossini et sa Petite messe solennelle à Bastille


Deux représentations de la Petite messe solennelle de Gioacchino Rossini étaient au programme de l’Opéra national de Paris ces 22 et 24 mars dernier. L’amphithéâtre Messiaen, sur le site Bastille, semblait être le lieu idéal pour ce joyau musical d’un Rossini au crépuscule de sa vie alors que le compositeur mène une retraite paisible hors du théâtre lyrique dont il fut un des brillants représentants jusqu’à son Guillaume Tell de 1829. Depuis, Rossini compose pour le plaisir et se consacre à la mélodie, aux œuvres vocales : un magistral et théâtral Stabat Mater en 1841, les foisonnants Péchés de vieillesse, rassemblés en quatorze volumes, et sa Petite messe solennelle de 1864. C’est dans sa maison de Passy qu’il écrit cette œuvre pleine de spiritualité où les accents de l’opéra buffa se font encore entendre dans quelques envolées brillantes.

Rossini par Nadar, 1856

Que reste-t-il du Rossini de L’Italienne à Alger, du Barbier de Séville, du Turc en Italie hors ces vocalises qu’il s’autorise dans cette composition loin d’être d’église ? La mélodie, cet inimitable don du beau phrasé, de l’aria qui va toucher le cœur jusqu’au plus profond et saisir l’âme dans ses moindres replis. Mélodie servie par un dispositif musical léger, éloigné des tempêtes orchestrales du maestro à son apogée. Juste deux pianos, un harmonium et, à la création, douze chanteurs, solistes compris.

L’interprétation donnée à l’amphithéâtre Messiaen a restitué cette proximité chaleureuse qui dut être celle des deux seules représentations du vivant de Rossini en 1864 et 1865 dans des lieux privés : public forcément restreint, deux pianos, un chœur, un peu plus étendu néanmoins, comptant près de trente choristes. Pianos fermés, interprétation toute de sobriété, un Agnus dei final, seul air dédié à la partie de contralto dans un dialogue intime avec le chœur, qui donne à l’œuvre, malgré l’accent triomphal de l’ultime « dona nobis pacem » une tonalité sombre et repliée sur elle-même.

Il est à déplorer que le public actuel offre une si piètre qualité d’écoute : cela tousse, racle et s’agite en permanence, entravant une totale échappée dans ces limbes extatiques que sont certaines œuvres. Certains sont au concert comme devant leur télé ou leur ordinateur…

« Petite messe solennelle, composée pour ma villégiature de Passy. Douze chanteurs des trois sexes, hommes, femmes et castrats seront suffisants pour son exécution, savoir huit pour les chœurs, quatre pour les solos, total douze chérubins. Bon Dieu, pardonne-moi le rapprochement suivant : douze aussi sont les apôtres dans le célèbre coup de mâchoire peint à fresque par Léonard, dit la Cène, qui le croirait. Il y a parmi tes disciples de ceux qui prennent des fausses notes ! Seigneur, rassure-toi, j’affirme qu’il n’y aura pas de Judas à mon déjeuner et que les miens chanteront juste et con amoretes louanges et cette petite composition qui est hélas ! le dernier péché mortel de ma vieillesse »

— Gioachino Rossini, Passy, 1863

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